L’équipe de l’émission Vous êtes ici, animée par Patrick Masbourian sur les ondes de la Première Chaîne de Radio-Canada, m’a invitée à faire la prière du lundi cette semaine. «Cool! me suis-je dit en recevant le courriel. Maintenant, qu’est-ce que je vais bien pouvoir raconter?»
La religion et les croyances comptent pour moi parmi les choses les plus intimes. Alors contrairement à la plupart des autres auteurs qui se sont prêtés à l’exercice (du moins, ceux que j’ai entendus!), il était très clair dès le départ que j’allais aller dans la montée de lait et l’humour beaucoup plus que dans l’émotion ou la spiritualité. Ça’a donné ceci (précédé d’une entrevue au sujet de Mama Cool), qu’on peut entendre lire sur le site de l’émission.
Éloge de la futilité
À Dieu, Bouddha, Krishna et autres Coco Chanel,
Je vous adresse aujourd’hui ces quelques mots dans l’espoir que vous puissiez, dans votre sagesse infinie, lancer un mouvement de tolérance mondial envers les filles qui assument pleinement leur superficialité.
Moi, Marie-Julie Gagnon, mère, épouse et travailleuse acharnée, j’avoue avoir développé, au fil des années, une dépendance à la futilité. Comprenez-moi bien. Il n’est pas ici question d’avoir la tête vide, mais plutôt de se donner le droit de la remplir par autre chose que ce qui est «socialement correct». Des exemples?
1- Écouter Paroles, paroles de Dalida et me transformer en personnage de manga aux larmes-rivières.
2- Danser en faisant du lypsinc sur les hits de Britney Spears.
3- Écouter Gossip Girl et espérer de tout mon cœur que Chuck et Blair finissent ensemble.
4- Faire de l’achat d’une paire de lunettes de soleil griffé l’objectif ultime de ma journée de congé et me la jouer à fond même si je les agence à un top qui m’a coûté 15$ sur elcheapo.com.
5- Ajouter Mange, prie, aime à ma liste de livres préférés. Et Le diable s’habille en Prada, tant qu’à y être.
J’aime, j’assume. Il me semble qu’on ne devrait pas devoir défendre ça, non?
Remarquez, il n’en a pas toujours été ainsi. J’ai passé mon adolescence avec Nelligan, Baudelaire et Mallarmé. Je ne comprenais pas ce que je foutais dans cette époque de merde où la hauteur du toupet était un indice de popularité. La nerd qui passait ses heures de lunch à la bibliothèque, c’était moi. Dans les années 80, l’adolescente que j’étais préférait de loin compter les pieds et les vers que les six packs de bière. J’étais persuadée d’être la réincarnation du beau Émile et de me retrouver un jour internée comme lui, condamnée à fantasmer sur des morts, entourée de posters de Bon Jovi que je n’aurais pas choisi. Mais je m’égare.
Au fil des ans, j’ai accumulé les expériences variées. J’ai rencontré d’ex-enfants esclaves de plantations de cacao au Mali. J’ai touché le marbre du Taj Mahal et les colonnes du Panthéon. J’ai aimé passionnément l’Asie au point de m’y installer. J’ai lu, j’ai vu, j’ai goûté. J’ai regardé la pauvreté dans les yeux. Forcément, je suis allée dans les extrêmes.
Puis, j’ai eu besoin de ramener la futilité dans ma vie. Quoi de plus rassurant qu’une bonne comédie romantique à la fin prévisible? Tout le monde a besoin d’une dose de «happy ends».
Je suis à la fois sensible au sort des autres et… accro du shopping. Même si j’ai souvent trouvé que mes envies contradictoires d’aider la planète et d’avoir la garde-robe de Victoria Beckham frôlaient le ridicule, j’accepte de plus en plus cet état des choses. Je ne peux pas rejeter en bloc la culture de consommation dans laquelle j’ai grandi. Je ne peux pas prétendre comprendre l’extrême pauvreté non plus. On peut être empathique, mais comprendre vraiment quand on est né dans un monde privilégié? Comprendre au point de se délester de TOUS ses mauvais plis d’Occidentaux tout en conservant sa santé mentale? Je reste sceptique. De la même manière que je fronce les sourcils quand j’entends un «branché extrémiste» défiler sa liste d’incontournables. Quand t’as grandi en entendant New Kids on the block à la radio, ça laisse forcément des traces.
Tant qu’à y être, chers Dieu et compagnie, ce serait le fun de donner un break aux magazines féminins. On le sait que les photos sont retouchées. Qu’on vend du rêve et des petits pots de crèmes bien marketés. Que l’emballage est plus important que le contenu. Pis? Ne sommes-nous pas, justement, des adultes consentants? Évidemment, je ne parle pas ici d’enfants ni même d’adolescents. Mais c’est notre boulot de faire en sorte qu’ils ne prendront pas ces images de perfection pour du cash. Et puis, que ceux qui croient que la mode et la beauté sont superficielles meurent dans un nuage de spray net! Les tendances en disent souvent autant sur une époque que les livres d’histoire.
Je revendique aujourd’hui, messieurs-dames de la galaxie divine, pour moi, pour ma fille et pour toutes celles qui le crient en silence, le droit d’être à la fois profonde et superficielle. À être multidimentionnelle, quitte à ce que mes contradictions et mes imperfections – imperfections aux yeux de qui, d’ailleurs? Décrétées imperfections par qui, hein? – dépassent de mes habits dernier cri.
D’être, s’il le faut, une vraie quétaine plutôt qu’une pseudo-moi.
Et puis, la superficialité est parfois dans les yeux de celui qui regarde…
Amen.
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Marie-Julie, je t’adore! 🙂
Ahh ! Ça fait du bien ! Même si j’haïs gamasiner, je revendique le droit moi aussi de tripper sur des films d’ados (NON cette fois je ne le nommerai pas ! :)) et de dévorer les revues à potins !
Merciiiii MJ ! xxx
Je suis une de tes disciples 😉
Alléluia !!!
Ayant quitté il y a quelques années la chronique boursière pour la chronique mode, je dois dire que j’adhère totalement à la religion de la futilité !!!
Où ont lieu les cérémonies ? Au H&M le vendredi pm ? J’y cours ! 😉
Hihi chouette cette intervention; je suis totalement d’accord! Sauf pour Baudelaire qui ne prend pas de “E”!! (je suis désolée mais ça agace la littéraire en moi 😉 )
@Paula: Moi aussi! (Je veux dire «Je t’adore, toi», pas «Je m’adore, moi»! hi! hi!)
@Marie l’urbaine: Je ne vois pas à quel film tu fais allusion! 😉
@Josiane: Merci Josiane! À la vie, à la mort!
@Nancy_BP: lol
@Annie: Quelle succursale de H&M? Moi aussi! Moi aussi!
@laderoutee: Aaargh! J’ai fait la correction! Merci! Faudrait que je le relise, ça fait trop longtemps…
Les gars peuvent-ils aussi revendiquer la futilité?? Les sports, les chars, les grosses maisons…On donne pas notre place!! Après t’avoir vu magasiner des roller-blade, je comprends parfaitement ton point!!!
Chère Marie-Julie, complètement d’accord avec toi! J’adore à la fois avoir des conversations “songées” et mon armoire remplie de fringues branchées. Ça fait de nous des personnes multidimensionnelles qui savent s’adapter, non?
Tu as écris ce que je pensais tout bas…
Mais non, en “girlies” assumée je dis qu’il en faut de cette futilité.
De plus, je suis toujours partante pour une cérémonie d’initiation au H&M précédée d’un Mojito sur une terrasse bien entendu!
J’aime la vision “multidimensionnelle” de Véronique!